Faut-il constituer une SCI et opter pour l’impôt sur les sociétés ?

Faut-il constituer une SCI et opter pour l’impôt sur les sociétés ?

L’alourdissement de la nouvelle fiscalité des plus-values immobilières applicable depuis le 1er février 2012 (loi de finances rectificative du 19 septembre 2011), a conduit les adeptes de la société civile immobilière a réviser leurs habitudes.

 

En effet sous le régime fiscal antérieur de taxation des plus-values , nombre de praticiens reconnaissaient les mérites de la société civile soumise à l’impôt sur le revenu (taxation des loyers aux revenus fonciers en vertu de l’article 8 du CGI), dans la mesure où la plus-value réalisée lors de la cession de l’immeuble social détenu par la SCI depuis plus de 15 ans était purement et simplement exonérée d’impôt.

Il n’en est plus rien depuis le 1er février 2012 : seul un bien détenu par la SCI depuis plus de TRENTE (30) ans permet l’éxonération totale de la plus-value.
Le débat sur le choix du régime fiscal de la SCI est donc relancé, et les praticiens conseillent vivement d’établir des simulations chiffrées pour comparer les avantages et inconvénients des différentes impositions.
La difficulté dans l’analyse comparative des régimes fiscaux est de prendre en compte les incidences tant en terme d’imposition des résultats enregistrés au cours de l’exercice social, qu’en terme d’imposition de la plus-value enregistrée en cas de revente de l’immeuble social ou des parts sociales.
En dehors des calculs qui apparaissent nécessaires pour emporter un choix, les avantages et inconvénients de chacune des impositions peuvent être synthétisés de la manière
suivante :AU REGARD DE L’IMPOSITION DES RESULTATS COURANTS
Le résultat réalisé par la SCI soumise à l’IR est imposable au niveau de chaque associé (en proportion de sa part dans le capital social) dans la catégorie des revenus fonciers, rapportable on le sait aux autres revenus du foyer fiscal, et imposé à la tranche marginale d’imposition qui peut atteindre le taux 41%, outre les prélèvements sociaux au taux de 15,50% pour les revenus 2012.

Quant au résultat de la SCI soumise à l’IS, l’imposition est déterminée au niveau de la société selon les règles des BIC (bénéfices industriels et commerciaux).
A ce titre, l’assiette taxable sera diminuée des frais d’acquisition, des travaux de toute nature sans exception, et d’une fraction de la valeur du bien (l’amortissement).

D’autre part, sur cette assiette au périmètre de charges déductibles plus important que pour les revenus fonciers, le taux d’imposition applicable est seulement de 15 % jusqu’à 38000 € de bénéfices et 33,33% au-delà.

En règle générale, la fiscalité des revenus fonciers est plus pénalisante, voire confiscatoire aux yeux des contribuables imposés à la tranche marginale d’imposition la plus élevée de l’IR, surtout lorsque l’emprunt souscrit par la SCI pour acquérir le bien se trouve remboursé et qu’il n’y a plus d’intérêts à déduire des loyers bruts.

Par ailleurs, pour être exhaustif, il convient également de prendre en compte la politique de distribution des dividendes par la SCI soumise à l’IS. En effet, si les associés peuvent se passer d’appréhender le résultat de la SCI par voie de distribution de dividendes (mise en réserve donc), ils échappent à la taxation à l’impôt sur le revenu personnel (taxation à l’IR des dividendes diminué d’un abattement de 40%)Dans ce match IR-IS, la SCI soumise à l’IS l’emporte souvent quand la SCI n’a plus d’emprunt et que les associés n’ont pas besoin de « sortir» des revenus de la SCI et acceptent de mettre en réserve, ou si les associés possédent des comptes courants remboursables en franchise d’impôt.

AU REGARD DE L’IMPOSITION SUR LA PLUS-VALUE LORS DE LA REVENTE DE L’IMMEUBLE SOCIAL
L’option à l’IS présente un inconvénient majeur lors de la cession de l’immeuble social : la taxation des plus-values professionnelles.
En bref, la plus-value taxable est constituée par la différence entre la valeur de revente et la valeur nette comptable de l’immeuble (c’est à dire la valeur d’origine diminuée des amortissements pratiqués chaque année). Elle augmente donc avec le temps, et est taxée aux taux de l’IS (15 % et 33,33%)
Au contraire, l’assiette de la plus value en matière d’IR se « contracte » tous les ans au-delà de la cinquième année, pour être effacée au bout de 30 ans de détention.
L’objectif de l’investissement et l’horizon patrimonial de l’investisseur doivent en conséquence être pris en compte :
L’investissement est-il un investissement locatif destiné à dégager des bénéfices importants ? (par opposition par exemple avec un investissement destiné à loger ses enfants)
‘immeuble social devra t-il être revendu ? Si oui, à quelle échéance ?

Si la revente est envisagée à cour ou moyen terme, ou s’il s’agit au contraire d’un immeuble destiné à être conservé, voire transmis aux générations futures,  l’inconvénient de l’IS en terme de plus-value, rapporté au gain en matière d’impôt sur les revenus, pèsera moins dans la balance.

AU REGARD DE L’IMPOSITION SUR LA PLUS-VALUE LORS DE LA CESSION DES PARTS SOCIALES
Si la SCI est soumise à l’IS, le régime de l’imposition sera celui des plus values de valeurs mobilières : taxation au taux de 34,5O% sur la différence entre la valeur d’acquisition des parts et leur valeur de revente, sans déduction ou abattement.

Si la SCI est soumise à l’IR, la taxation aura lieu selon le même régime que la vente des immeubles de particuliers au taux de 34,5O%, applicable sur la différence entre la valeur
d’acquisition (ou de souscription) des parts et le prix de la revente. Toutefois dans ce cas la plus-value brute est diminuée d’un abattement au-delà de la sème année de détention.DANS QUELLES SITUATIONS PRATIQUES LE CHOIX SE PRÉSENTE A L’INVESTISSEUR?
2 situations peuvent se présenter.

L’investisseur détient déjà l’immobilier dans une SCI. Auquel cas, les associés pourront décider à l’unanimité d’opter pour l’impôt sur les sociétés par délibération prise en assemblée générale extraordinaire, et notifier cette option au centre des impôts.
L’investisseur est propriétaire en direct d’un immeuble. Auquel cas il lui sera nécessaire au préalable d’apporter ou de vendre ledit immeuble à une SCI à constituer et qui opterait à l’IS.
Attention, dans les deux cas cette opération rend imposables les plus-values latentes réalisées depuis l’acquisition.UN INCONVÉNIENT MAJEUR DE LA SCI SOUMISE A l’IS : l’IRREVOCABILITE DE L’OPTION A L’IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS
Si formalisme de l’option reste simple, les conséquences sont lourdes.
En effet, l’option est irrévocable et en conséquence un retour « en arrière» à l’IR n’est plus possible.
Cette irrévocabilité est un réel inconvénient, si la fiscalité de l’IS change à l’avenir. Il n’est pas impossible de penser que le législateur pourrait supprimer le premier taux de l’IS de 15 % pour les sociétés civiles ou augmenter le taux de 33,33%.

LES SOLUTIONS INTERMEDIAIRES
L’inconvénient de l’irrévocabilité de l’option IS peut être contourné.

En effet, il est dans certains cas possible de constituer un groupe de sociétés civiles dont la société fille (propriétaire de l’immeuble social) serait soumise à l’IR, et dont tout ou partie du capital social serait détenu par une société civile mère soumise à l’IS. Dans ce cas la SCI fille n’a pas besoin d’opter pour l’IS. Le résultat de la SCI fille serait traité distinctement selon que cette SCI est composée d’associés personnes physiques soumis aux revenus fonciers, et d’associés personnes morales soumis à l’IS. Qui plus est, des relations de comptes courants d’associés pourraient être mises en place concernant les sociétés filles et mère.
Le recours au démembrement de propriété des parts sociales pourrait être suggéré, et on peut imaginer qu’une personne physique détienne la nue propriété temporaire des parts et la société civile IS l’usufruit temporaire des mêmes parts.
Ces stratégies d’optimisation nécessitent bien sûr le recours à un professionnel de la transmission du patrimoine.Marc BLETOUX
Notaire

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